Éléments biographiques

Elie Delamare Deboutteville (29 octobre 1947 – 17 septembre 2013)

Eléments biographiques

Le contexte familial

La famille Delamare-Deboutteville, dont est issu Elie, est originaire de Normandie et plus précisément de la région rouennaise.

Le nom composé vient de la réunion, par mariage, d’une Audibert de Boutteville, avec un François Vendémiaire Delamare. Les premiers d’origine aristocratiques, étaient plus volontiers officiers et marins. Ils suivirent Dupleix en Inde et s’établirent à Pondichéry pendant près d’un siècle (l’un d’eux fut commandant des troupes de la Compagnie des Indes) avant de revenir après la chute de cette ville en 1761, en France, forts de l’expérience et des connaissances acquises dans le commerce d’Inde en Inde, dans la confection des indiennes et dans l’industrie textile en général. Les seconds, les Delamare, n’ont jamais quitté Darnétal, proche de Rouen où, depuis le Moyen âge ils exerçaient la dignité de maîtres drapiers.

On trouve ainsi réunis les qualités d’aventure et de curiosité des Boutteville et la stabilité toute terrienne des Delamare.

Ce sont donc des intérêts commerciaux qui rapprochèrent les deux familles et composèrent cette raison commerciale que devint le nom, la marque, Delamare-Deboutteville, rassemblant les filatures des deux familles principalement installées dans la vallée de la Cailly, le Manchester normand. A cela s’ajoute un sens du commerce, de l’industrie mais aussi, comme on va le voir, une dimension « spriritualiste ».

Plusieurs brevets quasi exclusivement dans le domaine des machines textiles, témoignent de l’esprit d’ingénieur qui anima leurs descendants. Le plus illustre de ceux-ci, Edouard Delamare-Deboutteville, est reconnu comme celui qui construisit, avec l’aide de son contremaitre Léon Malandain, la première automobile au monde qui roula avec un moteur à explosion, ancêtre de nos moteurs modernes dont la conception fut peu modifiée pendant des décennies. Cela se passa à Fontaine le Bourg, au dessus de Rouen, dans l’une des filatures de la famille. François Delamare-Deboutteville devait mourir à 45 ans après avoir inventé l’automobile, puis de grands moteurs à gaz primés aux expositions universelles, ayant réuni une collection d’ornithologie, réalisé un dictionnaire français-sanscrit et soutenu les révolutionnaires indiens contre l’Angleterre, ayant implanté les premiers parcs à huitres dans le Nord Finistère… entre autres choses. Apparenté à toutes les grandes familles industrielles de la région de Normandie et même de Grande Bretagne, Edouard était tombé follement amoureux de sa nièce qui avait deux ans de moins que lui et qu’il épousa par dispense papale, les deux familles ayant de grands biens. Elle lui donna cinq enfants.

Son fils Marcel, le grand père d’Elie, continua dans la même lignée mais avec une caractéristique singulière : l’occultisme qui a irrigué la vie de toute la famille, en particulier autour de la grand-mère, parfait médium, et du grand oncle Constant Legué. On prétend que déjà François était rose croix.

Voici ci-dessous un témoignage de Maurice Girodias  dans son livre de souvenirs. Les scènes et notations se passent juste avant la deuxième guerre mondiale.

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Je m’étais fait de nouveaux amis d’un style plus austère. À première vue, la famille Delamare, avec ses cinq garçons, appartenait à la bourgeoisie la plus conventionnelle de Neuilly. Mais j’avais rencontré les deux fils aînés, Édouard et Claude, le premier plus vieux que moi et l’autre un peu plus jeune, à la société théosophique, et cela créa une curiosité réciproque, puis des liens d’amitié…..

À seconde vue, les Delamare devinrent  beaucoup plus intéressants, plongés qu’ils étaient depuis plusieurs générations dans diverses  écoles d’occultisme. Le père était industriel le jour et mage le soir ; et même les trois frères cadets, âgé de 4, 6 et huit ans, était élevé dans la plus stricte orthodoxie théosophique. On ne trouve pas de jeux de cartes chez eux, mais un vaste choix de tarot ; à table, on jouait à interpréter les rêves des uns et des autres. Le moindre événement était immédiatement assimilé et analysé selon les doctrines occultistes, et, lorsqu’une dispute éclatait entre les garçons à propos des lois de karma, ou autres sujets du même ordre, c’était le père qui tranchait souverainement.

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C’était reposant, quoiqu’un peu hallucinant aussi, de se retrouver chez les Delamare à l’issue de ces confrontations. Comme la vie présente n’était pour eux qu’une étape parmi les centaines d’autres vies qui suivraient, rien n’avait vraiment d’importance ni d’urgence.

On comprend mieux, après ce témoignage, les idées d’Elie sur la réincarnation.

Yves, le père d’Elie, était le quatrième d’une fratrie de cinq garçons. Il s’engagea à la libération de Paris dans la 2ème DB et cela le conduisit jusqu’au nid d’aigle, Berchesgaden, en Bavière, d’où il rapporta bien des choses, mais surtout de l’argenterie, prises de guerre sur Hitler, dont la famille continue de se servir. Son frère ainé Claude, qui fut le plus jeune professeur du Muséum d’histoire naturelle, fit de la résistance et, hélas, son frère cadet, engagé dans la 1ère armée de Delattre fut tué en Alsace. Elie portera à sa naissance le même prénom que son oncle.

Il occupa des fonctions diverses tout au long de sa vie et termina sa carrière comme représentant pour la France d’une société hollandaise fabricant des bennes de déchargement de bateaux. Il n’est pas indifférent pour comprendre Elie de rappeler qu’il débuta dans la vie en étant tisserand sur un métier à tisser inventé et commercialisé par son père Marcel, au service des grandes maison de couture de l’après-guerre. Surtout, il était un être d’une très grande sensibilité, si vive qu’elle le conduisait à l’introversion et presque à l’autisme affectif. Ce n’était pas un grand communicant avec ses enfants. Excellent aquarelliste, il fut plusieurs fois exposé. Il a transmis à Elie sa sensibilité et son talent de dessinateur et de coloriste.

La mère d’Elie, Marie Anne Raffray, a connu son futur mari par son propre frère, André, de la même compagnie qu’Yves dans la deuxième DB. André, ingénieur de formation, sera tué en Indochine où il avait renouvellé son engagement dans le 2ème DB.

Marie-Anne vient d’avoir 19 ans et Yves 24 quand ils se marient début 1946. Elie naitra un peu moins de deux ans plus tard, le 20 octobre 1947, suivi de Martine en 1949 et d’Olivier en 1953. Marie Anne, comme sans doute beaucoup après une période de guerre et de privations, a un appétit féroce de la vie. Elle apporte à cette famille Delamare pour le moins originale sa vitalité et les racines dont elle hérite de son père Félix, ancien combattant de 1914-18, un homme d’une droiture et d’une bonté formidables portées par une foi profonde. Les parents d’Elie divorceront et se remarieront. Yves avec Marie-Elisabeth Litt et Marie-Anne avec l’écrivain Henri Viard.

Tout cela crée le terreau d’où Elie sortit et l’explique en partie. Le reste est de l’évènementiel. La difficulté avec un parcours aussi atypique et singulier que celui d’Elie c’est qu’évoluant dans des mondes différents, sa famille et lui, son frère Olivier, administrateur du Sénat, sa sœur Martine, infirmière, ne communiquaient que peu sur sa véritable nature, celle de poète, que ses amis sont sans doute mieux à même de connaître et de faire connaître.

Son parcours « scolaire » :

– école communale, boulevard des Batignolles (la famille habitaient dans un premier temps un petit appartement rue Lebouteux dans le XVIIème, puis, à partir de 1956 ou 1957, boulevard Haussmann dans le VIIIème arrondissement de Paris) ;

– école primaire chez les Frères, rue du docteur Lancereaux ;

– secondaire dont :

  • Internat à Evreux (week-end dans la maison familiale de Houetteville) ;
  • Lycée Carnot (1 an) ;
  • Cours FIDES, avenue Victor Hugo où il rencontre Rose de Lavergne et aussi Jean-Marie Perrier et Jean-Marie Rouart, tout deux écrivains.

Elie passe le bac littéraire puis cesse ses études.